En janvier 2023, BNA-BBOT a lancé son programme Narrating Diversity. Tous les dix-huit mois, nous invitons un artiste (sonore) en tant que curateur : un curateur, un an et demi, un thème, différents publics. Ainsi, au cours du prochain quinquennat, en coopération avec les trois curateurs sélectionnés, BNA-BBOT souhaite ouvrir son organisation et ses activités à de nouveaux publics à qui nous voulons donner, dans le cadre de trajectoires de co-création à long terme, des impulsions vers un traitement artistique du son et de l'écoute, ainsi que vers la formation de récits à plusieurs voix.
Période 2023-2024 : Maarten De Vrieze
Lors d'une intervention sur les "desire lines" à la gare maritime de Calais, je suis tombé sur les mots "I wish for the future", inscrits sur une glissière de sécurité au bout d'une impasse. Ces mots m'ont fait l'effet d'un cri et m'ont fait réfléchir: "Pour quel avenir est-ce que je veux travailler?" Partant de la conviction que l'être humain peut jouer un rôle d'artiste, comme un organe du corps est vital, j'ai développé ma pratique. L'artiste comme organe du corps qu'est la société. À partir de rencontres, mes interventions créent des ouvertures dans l'enfermement conditionné, par lesquelles l'imagination gagne de l'espace pour des alternatives. Des gestes artistiques qui rendent tangible ce qui reste invisible du fait des formes dominantes de pouvoir. Dans le vivre ensemble, la question "Pour quel avenir est-ce que je veux travailler?" force la question "Pour qui est-ce que je veux travailler?".
Pour l'instant, j'ai déplié ma tente et je l'ai plantée dans la vitrine de BNA-BBOT. Ma pratique nomade y trouve un abri temporaire et ce, à la demande de l'organisation artistique pour assurer le curatoriat de la saison 2023-2024. À partir de ma pratique, dont certains éléments des "desire lines" sont présents dans la vitrine, j'engage un dialogue avec d'autres artistes, chercheurs et philosophes. Les visiteurs sont invités dans ma tente pour suivre ces développements pendant que je cherche des témoignages sonores qui me guident à travers la ville de Bruxelles.
En tant que curateur, je regarde autour de moi avec le même regard que celui que j'ai développé dans ma pratique artistique. En tant que curateur, je me demande ce qu'une institution artistique peut faire, si le mot "cura" signifie littéralement "prendre soin". Quel devrait être le rôle d'une institution, alors que la sphère publique extérieure est façonnée par le discours raciste et les "fake news"? Lorsque l'information s'écarte de notre réalité, quel est l'avenir auquel nous sommes confrontés? En se concentrant sur des faits concrets et des témoignages précaires, les ponts se rendent visibles dans une mer de désinformation. En utilisant le microphone comme un outil, dépourvu d'éléments visuels, l'audition devient le centre d'attention. De la voix, les témoins précaires deviennent palpables jusqu'au corps, jusqu'au monde commun.
Maarten De Vrieze